Certaines choses sont parfaites parce qu’elles restent sans nom. Qu’est-ce qui a entretenu l’élan de classification systématique de tout ce qui a le malheur de traverser nos esprits, passer entre nos mains ou sous nos yeux ? J’ai le sentiment que la spécification, et donc la spécialisation, amènent à la quantification, puis à l’exploitation pour finir à la maldonne. Ce que l’on appelle « Big Data » viendra me hanter une fois de plus…
On peut argumenter pour et/ou contre l’usage et la pratique, sans oublier le besoin, de tout préciser. L’Occident fait, à mon sens, la démonstration la plus puissante d’une sophistication nominative exacerbée qui nous éloignerait de possibles épiphanies lorsqu’au contact des simplicités de la réalité. Camus l’avais senti : « Mal nommer les choses, c’est ajouter au malheur du monde. » Je me souviens du lógos grec antique ; pourrait-on se demander s’il avait, à un moment donné, muté en ethos qui forme, à son tour, un pathos ? ; la trinité de la déconfiture se déssine ; reminiscence des mythes de la fameuse Babylone, grande, qui se noie dans la cacophonie de ses langues. À prétendre pouvoir tout dire, donc tout savoir, on ne sait ironiquement plus ce que cela signifie et le discernement du sapere se voit contraint à l’évanouissement. Ah… Alors le feu prométhéen mérite possiblement nouvel examen. Pardonnez-moi, puisque l’idée d’une société du silence m’attire. Ces choses qui, de toutes les façons, préfèrent l’anonymat par essence avant même l’existence de l’envahisseur, sont ce qu’elles sont. Qui a définit le plus fidèlement ? Selon quelle échelle ? Exactitude ? Scrupule, peut-être ? Est-il envisageable de mesurer un ratio « vrai : réel » ? Ou bien les choix de porter un masque et de se taire ont plus de points communs qu’il n’y paraît ! C’est en brûlant quelques étapes et choisissant d’anticiper bon nombre de conclusions qu’il me tarde d’acquérir l’inspiration de démontrer que le substantif cache la vérité d’une entité, d’un être ou des secrets de la Création, qui souhaiterait nous parvenir. Étymologistes, contemplez l’or rétroactif dans vos paumes, dans les aboutissants de votre science. Définir du qualitatif par du quantitatif ne permet jamais de s’approcher de la plus haute dimension correcte d’un item. Là, il faudrait comprendre que nous ne sommes pas notre nom, car quand on dit « Alban », on m’appelle mais ne me définit pas.